La bête à bon Dieu

Les insectes souffrent d'une mauvaise réputation et sont souvent sujet à dégoût. Que cela soit les blattes, les moustiques, les chenilles, les mouches, les bousiers, ce n'est pas ce qu'il y a de plus attirant. Un coléoptère semble toutefois faire exception, la coccinelle. C'est une espèce plutôt bien appréciée, relativement épargnée (on ne l'écrase pas direct avec son journal), limite on la regarde et on la trouve jolie avec ses petits points qui, contrairement à la croyance populaire ne donnent pas son âge mais sont propre à son espèce. On la surnomme la bête à bon dieu. Pourquoi donc un tel traitement de faveur ? 

Il faut savoir que les coccinelles sont très pratiques dans l'agriculture car elles se nourrissent de pucerons, de cochenilles, d'acariens, de larves d'insectes ou de champignons qui dégradent les plantations et agissent ainsi comme un insecticide naturel (oui, c'est un insecte insecticide...). Elle a donc toujours été bien vue par les agriculteurs qui n'hésitaient pas à la préserver et même à sciemment les propager. Pour être exact, certaines espèces, les coccinelles phytophages, se nourrissent de végétaux et dégradent donc les champs. Cependant, la plus répandue, la coccinelle à 7 points, n'est pas de ce type là et c'est d'ailleurs à elle qu'on donne beaucoup de surnoms religieux. En anglais, on parlait historiquement de Our Lady's bird, l'oiseau de Notre Dame (pour désigner la Vierge Marie), qui donna Our Lady's bug puis Lady's bug puis ladybug, son nom actuel. En allemand, on parle de Marienkaefer, soit le scarabée de Marie. En espagnol, Mariquita pour Petite Marie. Ces références à Marie font écho aux 7 joies et aux 7 douleurs de la Vierge et dont les 7 points de la coccinelle représenteraient.  

Sauf qu'en France, on ne parle pas de Marie mais de Dieu directement. Pourquoi ne faisons-nous pas comme nos voisins ? Hé bien, cela nous vient d'une légende. Au Moyen-Âge, un homme aurait été accusé d'un crime qui lui valut d'être condamné à la décapitation alors même qu'il clamait son innocence. Alors qu'il posa sa tête sur le billot, une coccinelle vient se poser sur sa nuque. Le bourreau tenta de la faire fuir mais à chaque fois, l'insecte revenait. Le roi Robert II le Pieu y vit un signe de Dieu et décida de gracier l'homme. Quelques jours, on retrouva le véritable coupable. L'homme était donc bel et bien innocent et Dieu, par l'intermédiaire de cette coccinelle, était intervenu pour éviter une telle injustice. Cette affaire se propagea assez rapidement. Pouvant être l'intermédiaire de Dieu, on se mit à l'appeler les coccinelles les bêtes à bon Dieu et elles furent considérés comme porte-bonheur et il ne fallait surtout pas les écraser. Réalité, fiction ? C'est une légende, on ne sait pas mais l'histoire est belle et ce n'est pas plus fantaisiste que de dire qu'elles ont 7 points donc ça représente les 7 joies et 7 douleurs de Marie. 

Ce savoir m'a été inspiré par une amie prénommée Stéphanie, merci à elle.