Nicolas Flamel, l'alchimiste ?

Quand on parle d'alchimie, impossible de ne pas évoquer le nom de Nicolas Flamel. On le retrouve dans de nombreuses œuvres culturelles à succès (pour en évoquer qu'une seule, proche de nous, la saga des Harry Potter). Ce brave homme est réputé pour être celui qui, devant tout autre, aurait réussi l'exploit de créer la pierre philosophale, cette pierre capable de réaliser ce que les alchimistes considèrent comme le grand œuvre, c'est-à-dire, transmuter des métaux vils comme le plomb en des métaux nobles comme l'or. On lui prête aussi des capacités curatives telle la panacée et l'allongement de la vie humaine, pour ne pas parler de la vie éternelle. Cocorico, c'est un français qui aurait fait ça, c'est cool mais...les études historiques nous racontent une toute autre histoire qui fait, je l'avoue, bien moins rêver. 

Le personnage de Nicolas Flamel a bel et bien existé de manière certaine entre 1330/1340 et 1418. Mais le plus célèbre de tous les alchimistes n'en a en réalité jamais fait. Nicolas Flamel est un écrivain public, c'est une réelle profession avec de nombreux pairs qu'ils cotoient dans la rue des Écrivains, et qui consiste à écrire des lettres et des actes pour tous ceux qui ne maitrisent pas l'écriture ou qui n'ont pas envie de s'embarasser avec cela (et ils sont nombreux au Moyen-Âge). Nicolas Flamel avait une plutôt bonne clientèle, il développa bien son réseau et cela l'enrichit considérablement. C'est un homme cultivé, brillant, avec une belle plume et forcément, il réussit. Sauf que sa réussite est plutôt mal vu et les jaloux diront qu'il a acquis sa fortune par des moyens détournés et pas très loyales/justes. Il faut savoir qu'au XV^e siècle, il y a un certain engouement de la bourgeoisie pour l'alchimie qui était une activité de riches tant le matériel et les produits coûtaient chers, qu'il fallait une bonne culture et qu'il fallait se permettre de perdre du temps dans une activité qui ne rapporte rien. Et forcément, beaucoup de mauvaises langues ont sauté sur l'occasion pour répandre la rumeur d'une richesse aux origines alchimiques et Nicolas Flamel est loin d'être le premier qu'on accuse de cela. Nicolas Flamel fit orner une arcade au cimetierre des innocents avec certaines créatures mythiques comme des dragons à laquelle on attribue des sens ésotériques. Mais ce qui va ancrer fondamentalement la légende est une pratique assez en vogue qui s'appelle la pseudépigraphie. Vous écrivez une belle œuvre mais vous êtes un sinitre inconnu dont les opinions importent peu ? Pas de soucis, dites que votre œuvre a été écrite par un grand de ce monde, comme Aristote, Thomas d'Aquin qui se sont vus attribuer des livres dont ils n'ont strictement rien à voir et cela donnera du crédit à votre œuvre, à ce que vous y développerez et surtout le succès. Ainsi plusieurs putatifs traités alchimistes de Nicolas Flamel, ou qui parlent et évoquent celui-ci comme alchimiste, fleurissent. Il se trouve qu'un des best-seller de l'alchimie, vraiment, un livre qui a eu un succès dans toute l'Europe, sorti en 1612 (quasi 2 siècles après sa mort) nommé "Trois traitez de la philosophie naturelle non encore imprimez", contient une traduction du latin de "Les livres des figures hiéroglyphique" écrit selon l'auteur par Nicolas Flamel. C'est les livres des figures hiéroglyphiques qui va faire grandir l'image de Flamel comme l'un des plus grands alchimistes de son époque et propage l'idée qu'il aurait pu réussir à faire la pierre philosophale grâce à un vieux bouquins écrit par Abraham le juif, prince et prête lévite. Vous le sentez le vrai bon roman de fiction ?

Avant toutes ces spéculations romanesques, historiquement, rien ne prouve qu'il n'a, ne serait-ce que, pratiqué ou eu des connaissances en alchimie. Il a bien gagné sa vie mais ce n'était pas non plus un grand aristocrate, gros bourgeois. S'il pouvait créer de l'or, il aurait pu s'élever beaucoup plus. Ce sont juste des envieux et des opportunistes qui ont profité de son nom et de sa renommée pour donner du caractères à leurs écrits qui ont construit la légende de Nicolas Flamel. Si vous ne me croyez pas, sachez que ce n'est pas moi qui dit ça mais Socrate dans un livre non publié que je ne sourcerai pas.